Des lieux et des hommes

 

Introduction

 

« Des lieux et des hommes » est une rubrique de notre site qui tire son existence à partir des sorties pédagogiques organisées par notre association. En effet, les membres de l’A R T accompagnés de parents et d’amis se retrouvent régulièrement autour de projets pédagogiques : visite de sites suivis de repas dansants, au cours desquels des personnages liés à ces sites sont mis à l’honneur.

 

 

 

La Petite France et le vieux tangue

 

Jacques lougnon

 

La Petite France est à l'origine une propriété d’un certain Ker Anval qui bâtit sa maison au milieu de la forêt, dans les hauts de Saint-Paul. Le climat était celui de la France et tout y poussait comme en France, si bien que les visiteurs s'exclamaient : Mais c'est une petite France ! D'où son nom. La forêt était alors composée de bois de couleur : Tan Rouge, Natte, Bois de Fer ...

Vers 1920, ce fut la grande époque du géranium, on abattit la forêt pour planter le géranium, qui est resté la culture principale de la Petite France et qui lui donne ce paysage si caractéristique avec ses acacias servant à entretenir les foyers des alambics pour la distillation. Ces arbres poussent très vite et en alternance avec le géranium permettent à la terre de se régénérer, car le géranium l'épuise beaucoup.

Au village quelques artisans coupent le calumet qui se trouve en grande quantité sur la route du Maïdo. Le calumet est le seul bambou indigène de La Réunion. Il a été beaucoup employé à l'époque pour la construction de cases et paillotes.

On ne peut pas parler de la Petite France sans avoir une pensée pour le plus illustre de ses enfants, celui que l’on surnommait le « Vieux Tangue » : Jacques Lougnon.

Jacques Lougnon est né le 29 octobre 1920. Il est le petit dernier d’une famille de sept enfants. Son père, Albert était officier de marine. Son grand-père paternel, Jean-Baptiste, arrivé dans l’île en 1873, a été Directeur de l’Intérieur et gouverneur par intérim de la Réunion. Son arrière-grand-père maternel n’est autre que le sieur Ker Anval qui s’est installé à l’époque en pleine forêt des hauts de Saint-Paul et qui a créé la propriété familiale.

Jacques Lougnon grandit à Bellemène. Sa mère, Marie, rêve d’un fils prêtre. Lui aussi pressent un appel et cherche. Juste avant la guerre, sa famille se trouve dans une situation qui frise la précarité. Il entre au séminaire de Cilaos puis chez les spiritains à Paris. Après le paludisme et la typhoïde, il contracte à 20 ans une tuberculose qui l’empêche d’accomplir son service militaire. Il va en Suisse pour se faire soigner et y poursuivre ses études, alors que la guerre fait rage dans toute l’Europe. Il rencontre une Réunionnaise, qui deviendra son épouse. Adieu les études religieuses et la prêtrise ! Il passe sa licence de lettres et devient professeur de français, de grec et de latin.

À la fin de la guerre, il n’a qu’un seul désir : retrouver son île natale, qui lui manque tant. Il la retrouve exsangue. Bâtisseur dans l’âme, il retrousse ses manches. En semaine, il enseigne au lycée Leconte-de-Lisle. Le week-end et pendant les vacances, il est paysan chez lui. Il rachète peu à peu la propriété familiale de la Petite France qui croule sous les hypothèques.

Se posent alors pour les habitants de la Petite France des problèmes de scolarisation des enfants et de participation des familles aux offices religieux. En effet, ils doivent se rendre au guillaume, par un chemin en très mauvais état. La famille Lougnon décide alors d'offrir un terrain à la municipalité pour y bâtir une école primaire, et un autre à l'évêché pour y établir une chapelle catholique.   

La chapelle est édifiée en 1955, par Jean et jacques Lougnon, aidés des colons travaillant sur leur propriété. La chapelle de Petite France, recouverte d'une toiture à deux pans est construite en pierres de basalte, tirées des ravines alentours, taillées sur place et jointes à la chaux. 

Avec ses élèves, Jacques Lougnon utilise les expressions créoles pour mieux se faire comprendre. Grâce au dialogue, Il modèle les mentalités et forme de nombreux jeunes à la vie, dans le respect d’autrui. Puis, blasé par la vie dionysienne, il démissionne de son poste de fonctionnaire pour s’occuper à plein temps de ses terres.

Grâce à son érudition et son sens de la justice il devient un infatigable chroniqueur de presse. À la grande joie des plus démunis, car il écrit ce que le peuple pense et n’ose ou ne peut pas exprimer. Observateur averti, il a son mot à dire sur tout. Engagé, ses combats sont innombrables et dérangent. Il est prompt à hausser le ton pour dénoncer ce qui ne va pas et ... pour proposer des solutions. Il prend pour cibles les nuisances de l’administration et pourfend certains fonctionnaires qui profitent de leur situation et ne font pas grand-chose. Libre des contingences politiques, il fustige les élus qui parfois abusent de leur position au pouvoir. Il n’épargne pas les collectivités, la SAFER, l’ONF. Il est le seul à pouvoir remonter les bretelles à un préfet… Il inspire le respect, lui qui ne s’embarrasse pas de diplomatie, lui qui se déplace en 4L.

Mais Jacques Lougnon n’est pas qu’un redresseur de torts, un empêcheur de tourner en rond, un chercheur d’erreurs. Il raisonne. Il est avant tout un constructeur, un homme d’action et de terrain. C’est un visionnaire. Il préconise des tables d’hôtes dans les années 1950 pour le développement du tourisme. Il plante des arbres par milliers, des acacias, des bosquets d’azalées, à perte de vue. Il fournit du travail à des familles entières. Il est le chantre du géranium Bourbon, de la forêt de tamarins. Il trace des kilomètres de routes forestières, crée des sentiers botaniques dans ses bois de couleurs, fier d’y montrer ses cafés endémiques ou ses orchidées sauvages.

Le soir, après une journée bien remplie, près de sa cheminée, il lit Virgile ou concocte ses billets pour la presse. Il s’investit pour la reconnaissance littéraire des écrivains réunionnais, réédite par deux fois l’œuvre d’Eugène Dayot, parraine le retour des cendres de Leconte de Lisle, crée avec Christian Vittori les Editions Azalées. Il fustige ces soi-disant intellectuels qui veulent transformer la langue créole ou ces politiciens qui envoient leurs nervis agresser des militants de l’autre bord. Il fulmine lorsque certains de ses colons battent leurs femmes et il va les enguirlander avec fracas.

Il est libre, Jacques ! C’est un juste ! Son plus grand plaisir est d’aller travailler dans la forêt avec ses ouvriers, avec les derniers tailleurs de pierre qui cherchent le fil de la roche, avec ses bardeautiers fiers de la noblesse de leur travail, ou d’attendre à la sortie de l’alambic cet extraordinaire élixir qu’est l’huile essentielle de géranium, au parfum exceptionnel, celui des hauts, celui de la dignité du travail et de l’amour du terroir.

Le 11 novembre 1997, Mgr Aubry a terminé son éloge funèbre sur ces mots : « celui-là qui quitte la vie de cette terre est plus vivant que nous ». Pour tout ce qu’il a été, pour tout ce qu’il a laissé, je crois, moi aussi, que le "Vieux Tangue" est toujours vivant ...

 

Source : Article du Journal de l’Ile de la Réunion du 11 novembre 2007

(en hommage pour les dix ans de la mort de Jacques Lougon)

 
 
 
 
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La forêt de Mare-Longue et le scientifique aux pieds nus

 

Theresien cadet

 

Tout au long du sentier botanique de Mare-Longue, on peut se faire une idée de la forêt telle qu’elle existait en basse altitude dans toute la partie humide de l’ile, avant l’arrivée des hommes.
 
La forêt de Mare-Longue est une forêt tropicale primaire unique. Ce vestige de la forêt tropicale humide de basse altitude est une véritable richesse botanique. Après trois siècles de déforestation, il reste moins de 7% de la forêt tropicale humide originelle à la Réunion, située principalement à Saint Philippe. La forêt primaire de Mare-Longue, miraculeusement rescapée, est la forêt tropicale la plus riche de la Réunion. Elle se situe entre 150 et 700 mètres d’altitude sur les basses pentes du massif du Piton de la Fournaise. La forêt tropicale humide couvrait autrefois toute la région au Vent de 0 à 800 mètres d’altitude. Classée en réserve biologique dès 1958 sur 23 hectares, la réserve de Mare Longue fut agrandie en 1981 à 68 hectares, date à laquelle elle devint la première réserve naturelle de La Réunion. L’accès à l’intérieur de la réserve est réglementé mais le sentier botanique aménagé par l’ONF permet aux visiteurs de découvrir ses richesses.
 
On ne peut pas se promener dans la forêt de Mare-longue sans avoir une pensée pour un illustre botaniste réunionnais : Il s’agit de Thérésien Cadet. En effet, il a été le premier à étudier de façon approfondie la végétation de la forêt de Mare-Longue. Au début des années 1970, il attire l’attention des gestionnaires de cette forêt sur la nécessité de préserver ce joyau du patrimoine naturel réunionnais face au risque de transformation en plantation de production de bois. Sans sa persévérance, en lieu et place de cette belle forêt de mare-Longue, nous aurions pu trouver aujourd’hui une forêt de cryptomerias !
 
Thérésien Cadet est né à la Réunion, plus précisément au Tévelave, le 21 juin 1937. Il est issu d'une modeste famille de milieu rural. Il fait ses études primaires dans son village natal, puis ses études secondaires au Collège de l'Etang-Salé et au Lycée Leconte-de-Lisle à Saint-Denis. Il obtient en 1956 le Baccalauréat de Sciences expérimentales avec mention bien.
 
Il quitte pour la première fois son île et entre en classe préparatoire scientifique au lycée Chaptal de Paris. Il réussit le concours des instituts de préparation aux enseignements du second degré et poursuit ses études à la Faculté des sciences de Paris en tant qu'élève-professeur. Il obtient successivement les certificats de licence de Botanique, de Géologie, de Zoologie, de Physiologie Animale, de Zoologie Approfondie, puis le Diplôme d'Etudes Supérieures de Botanique et le CAPES de Sciences Naturelles. En 1961, il est admis au concours de l'Agrégation de Sciences Naturelles. Après avoir obtenu l'agrégation il est de retour à La Réunion.
 
Il est nommé Professeur Agrégé de Sciences naturelles à l'Ecole Normale de Saint-Denis et crée le Laboratoire de sciences naturelles. En 1962, il assure avec quelques collègues le démarrage de l'enseignement scientifique universitaire à la Réunion et dispense les Cours et les Travaux Pratiques de Biologie Animale et Végétale du premier cycle universitaire, ainsi que la formation pédagogique des professeurs de collège, poste qu'il occupe pendant trois ans comme directeur d'études. Par ailleurs, il se rend dans les îles de l'océan Indien ainsi qu'au Kenya pour mener des prospections botaniques comparatives. Mais surtout il parcourt inlassablement le terrain à la Réunion où il herborise, collecte des échantillons de plantes et des témoignages, observe les différents milieux naturels et leur fonctionnement. Il entreprend ainsi de constituer un herbier auquel apporte plus de 7 000 échantillons. En 1963, il assure l'intérim du conservateur du Muséum d'histoire naturelle de la Réunion. Il fait alors l'inventaire des collections, mais surtout il réorganise la bibliothèque, fait restaurer bon nombre d'ouvrages dégradés et redynamise une ancienne association : les Amis du Muséum. Il entretient des correspondances et communique des échantillons à de nombreux correspondants scientifiques dont notamment les Jardins botaniques royaux de Londres et le Muséum national d'histoire naturelle de Paris. Avec le soutien de l’Office de la Recherche Scientifique et Technique d’Outre-Mer et de l’Institut d'Agronomie de l’ile Maurice, il débute la rédaction de la vaste œuvre collective de la Flore des Mascareignes, appelée à combler une longue attente car le précédent ouvrage de référence, la Flore de l’île de la Réunion de Cordemoy, avait été publié près de quatre-vingts ans plus tôt.
 
En 1966, il rejoint le tout nouveau Centre d'enseignement supérieur scientifique de la Réunion où il crée le laboratoire de biologie végétale. Parallèlement, la préparation de sa thèse « La végétation de l'île de la Réunion » l'amène à une réflexion plus axée sur l'écologie et la phytosociologie. Il s'attache en particulier à décrire les différents habitats naturels de l'île de la Réunion, à comprendre leur fonctionnement et à resituer les dynamiques de la végétation dans le contexte d'une île géologiquement jeune et isolée, souvent remaniée par les phénomènes de volcanisme et d'érosion et soumise à une grande variété de microclimats. Il délimite et nomme les grandes unités de végétation qui demeurent aujourd'hui les références fondatrices de l'écologie réunionnaise. Sa thèse est soutenue et publiée en 1977. Thérésien Cadet est alors reconnu comme le spécialiste incontesté de la flore des Mascareignes et le titre de Docteur d'Etat de l'Université d'Aix-Marseille III lui est décerné en 1977 avec mention très honorable et les félicitations du Jury.
 
Tout en poursuivant ses travaux d'enseignement, d'herborisation et de rédaction, il s'engage plus avant dans la vie locale et la sensibilisation à la protection de l'environnement. Il publie quelques ouvrages de vulgarisation botanique, apporte son expertise à de nombreux organismes (CAUE, ONF, Conseil économique et social régional …), il participe à la fondation de la SREPEN (Société réunionnaise d'études et de protection de la nature). Toujours soucieux de la place et de l'épanouissement de l'homme, conscient de la nécessité des compromis dans l'utilisation des territoires, il n'en défend pas moins avec beaucoup de conviction et d'obstination la préservation des forêts naturelles, soutenant la création de réserves, en particulier la réserve naturelle de la forêt de Mare-Longue. Il bénéficie au quotidien du soutien précieux de son épouse Jeannine qui fut aussi son élève et son assistante. C'est elle qui réalise, dans la tradition iconographique scientifique, des aquarelles d'orchidées dont une première série de 66 planches « Les orchidées de la Réunion » a été publiée en 1989.
 
Thérésien Cadet décède subitement d'une crise cardiaque le 2 février 1987. Il est Officier dans l'Ordre des Palmes Académiques puis Chevallier dans l'Ordre du Mérite Agricole à titre posthume. Le nom de Thérésien Cadet a été donné à un amphithéâtre de l'Université de Saint-Denis, à un laboratoire du Conservatoire Botanique National de Mascarin, aux collèges de Piton Sainte-Rose et de Saint-Benoît, au stade de Sainte-Rose et à plusieurs rues dans différentes villes du département. En 1993, une stèle a été inaugurée à la forêt de Mare-Longue en son hommage.
 
Son nom a été attribué à plusieurs plantes de la Réunion dont une orchidée endémique des Mascareignes : l’Angraecum cadetii.
 
 
 
Source : Thérésien Cadet - Botaniste et Ecologiste - Le Scientifique aux pieds nus - 
 
Editions Orphies - Auteurs : Serge Chesne et Claire Micheneau.
 
 
 
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Le Domaine des Colimaçons et la famille de Chateauvieux

 

Le Domaine des Colimaçons et la ville de Saint-Leu sont indissociables de deux personnages : L’un est le premier maillon, l’autre le dernier maillon d’une histoire familiale qui dura 129 ans. Tous deux ont dirigé le Domaine des Colimaçons. Tous deux ont été maire de Saint-Leu. Tous deux ont été membres du Conseil Général. L’un est un homme, l’autre une femme. Il s’agit de Joseph Antoine Sosthènes d'Armand de Chateauvieux et de Marie Thérèse de Chateauvieux, l’un étant l’arrière-grand-père de l’autre.

 

Sosthenes de chateauvieux

 

Joseph Antoine Sosthènes d'Armand de Chateauvieux

 

Joseph Antoine Sosthènes d'Armand de Chateauvieux est le fils du comte Joseph d'Armand de Chateauvieux et de Gabrielle de Bourdeille.

Il est né le 28 janvier 1804 au château familial, de Fontaine-Madame, commune de Chevannes, près d'Auxerre, en bourgogne.

Il y passe son enfance avec ses deux sœurs, Marie pauline, née en 1806, et Marie Léontine née en 1809.

Au lendemain de la Révolution, la famille de Châteauvieux ruinée doit vendre son Château.

En 1814, le Jeune Sosthènes se retrouve alors en Martinique, son père est nommé par Louis XVIII commissaire de la Marine dans cette colonie. Malheureusement, le comte meurt des suites d'une épidémie après seulement un an de séjour.

De retour en France, son Altesse Royale la duchesse de Berry prend la veuve et ses enfants sous sa protection. Joseph Antoine Sosthènes d'Armand de Chateauvieux se retrouve alors à Paris, il est inscrit au collège Stanilas.

Après ses études, il travaille à la raffinerie de Choisy qui appartient au comte de Villers, usine qui raffine les pains de sucre brut arrivés des îles. Il y acquiert un savoir-faire remarquable pour son époque.

Sosthènes quitte la raffinerie à la mort de son oncle dont il récupère son titre de marquis.

A Paris, le nouveau marquis rencontre le réunionnais Charles Desbassyns, cinquième fils de la célèbre et richissime Madame Desbassyns, propriétaire agricole. Charles Desbassyns un pionnier de la production de la canne à sucre à Bourbon (La Réunion) a créé en 1815 la première sucrerie moderne au Chaudron. Il est à la recherche d'ingénieurs, de gérants de propriétés digne de confiance, Sosthènes qui connait déjà la Martinique et le sucre, accepte la proposition de Charles Desbassyns de venir travailler à La Réunion.

En novembre 1830, il embarque pour La Réunion, devient le bras droit de Charles Desbassyns et travaille pendant cinq ans à la sucrerie de la Rivière des Pluies.

Le 13 janvier 1836, Joseph Antoine Sosthènes d'Armand de Chateauvieux se marie à la chapelle de Saint-Gilles les Hauts avec Marie Ombline Célinie de Villèle, son père Jean Baptiste de Villèle est un riche propriétaire et usinier de cannes à sucre et sa grand-mère Madame Desbassyns. Ils auront 10 enfants.

Après avoir construit une usine à Vincendo, il installe une chaudière à basse température sur l'exploitation de son beau-père à Petite Ravine dans les hauts de Saint-Leu. Sur la propriété de Monsieur Guigné, à La Grande Ravine, il bâtit une usine entière. Puis, en 1844, il devient gérant des terres du Bernica, à Saint-Paul, pour le compte de Madame Debassyns. En 1847 Sosthènes prend en charge l'ensemble des propriétés Villèle, secondé par son beau-frère Paul de Villèle.

Le 2 octobre 1857, Joseph Antoine Sosthènes d'Armand de Chateauvieux achète la vigie des Colimaçons à Saint-Leu. Construite en 1794 pour servir de vigie sur un promontoire naturel qui domine toute la côte, la vigie est un édifice rustique, deux tourelles en bois reliées par une passerelle couverte, avec à l'arrière quelques pièces servant de logement pour les veilleurs. De la vigie, il va faire un logis suffisamment vaste et confortable pour abriter toute sa famille.

Très vite, la vigie devenue le Domaine des Colimaçons, se transforme, d'ailes en pièces et en étage, la maison finira par totaliser 36 pièces. Des dépendances sont construites, logements pour le personnel, écuries, ateliers. Sosthène crée une pépinière et des serres où il introduit des plantes rares, il achète d'année en année les terres alentours, le Domaine des Colimaçons finira par totaliser 660 hectares.

En 1860, le marquis décide de remplacer la modeste chapelle en bois des Colimaçons par une église en pierre. Toute la famille de Chateauvieux, aidée par des voisins, va participer aux travaux. Le 22 juillet 1866, l'église du Sacré Cœur des Colimaçons est consacrée.

Homme infatigable, Joseph Antoine Sosthènes d'Armand de Chateauvieux, est secrétaire au Conseil Colonial, puis secrétaire au Conseil général, vice-président du Conseil Général, maire de Saint-Leu pendant 12 ans, de 1858 à 1870, et occupe le poste de la présidence de la Chambre d'agriculture de La Réunion.

Joseph Antoine Sosthènes d'Armand de Chateauvieux décède le 9 janvier 1885, il repose sous une dalle de son église.

 

 

Marie therese de chateauvieux

 

Marie Thérèse de Chateauvieux

 

Marie Thérèse de Chateauvieux est née le 20 avril 1915 à Saint-Denis de La Réunion. Elle est l'arrière-petite-fille du marquis Joseph Antoine Sosthènes d'Armand de Chateauvieux, fondateur du domaine des Colimaçons. Elle est la fille de Georges de Chateauvieux,  gestionnaire du domaine des Colimaçons et d’Amélie Adam de Villiers.

Marie Thérèse a deux frères, Guy né en 1916, et Jean en 1818. Elle est la cousine du père de Jacques de Chateauvieux.

A la mort de sa mère en 1919, elle quitte le domaine des Colimaçons, pour vivre chez ses grands-parents maternels à Sainte-Clotilde.

Marie Thérèse est scolarisée à l’unique collège pour jeunes filles de l’île, le collège de l'Immaculée Conception, de Saint-Denis.

En 1938, Marie-Thérèse de Chateauvieux part terminer des études de comptabilité à Paris. Elle est de retour à La Réunion dès 1939.

Suite au décès de son grand-père Joseph Antoine en 1940, c'est son père qui reprend la gestion du domaine des Colimaçons, elle participe alors à la bonne marche du domaine, s'occupant notamment de la comptabilité.

En 1961, suite au décès de son père, elle se retrouve, seule, responsable du domaine. Elle a sous sa direction 250 employés.

En 1965, commence pour elle une carrière politique. Inscrite sur la liste d’Henri Bègue, maire de Saint-Leu depuis 1959, elle se retrouve au poste de 3 ème adjoint après les élections municipales de 1965.

Plus tard, le maire de Saint-Leu malade est obligé de quitter son poste, le conseil municipal la propulse maire de Saint-Leu. C'est la première femme maire de La Réunion.

Pendant son mandat de maire, la commune de Saint-Leu connaît des travaux importants : constructions de groupes scolaires, de routes, de voiries, d'un dispensaire ...

En 1970, Marie Thérèse de Chateauvieux est élue conseillère générale de La Réunion.

En 1971, elle se représente aux élections municipales. Les Saint-Leusiens la reconduisent à la tête de la mairie.

En 1977, elle est de nouveau maire de Saint-Leu.

En 1983, elle se représente une nouvelle fois aux élections municipales. Face à elle, un seul candidat, Mario Hoarau, fraichement élu Président de la Région Réunion, grâce à l’alliance de la gauche et à la mouvance de l’élection de François Mitterrand à la Présidence de la République. La liste de Mario Hoarau sort gagnante dès le premier tour. Elle conserve son mandat de conseillère générale, jusqu'en 1989 puis quitte la vie politique réunionnaise.

Le Domaine des Colimaçons est acheté en 1986 par le Département de La Réunion. La maison et le parc sont mis à la disposition du Conservatoire National Botanique de Mascarin en 1987.

Depuis 2015, Marie Thérèse de Chateauvieux a rejoint le cercle des centenaires réunionnais.

 

Source : Site Internet « Mi Aime à ou »

 

 

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Le Tampon et la dynastie des Kerveguen

 

Parc des palmiers

 

Le Parc des Palmiers

 

Il est entré dans nos habitudes, à l’occasion de nos sorties dites pédagogiques, de lier des lieux à des hommes. Aujourd’hui, nous sommes au Tampon et ce matin nous avons visité le Parc des Palmiers. S’il y a une famille qui a modifié pendant un siècle le paysage agricole, économique et financier de La Réunion, particulièrement le Sud de l’île et notamment le Tampon, c’est bien celle des Kerveguen.

Jusqu’en 1925, le Tampon était un quartier de la commune de Saint-Pierre. En dehors de quelques concessions cultivées en café dans sa zone basse, ce quartier était au 18ème siècle une vaste et magnifique forêt, connue seulement par les noirs-marrons qui allaient se cacher jusqu'à La Plaine des Cafres (ce qui, par ailleurs, explique le nom de ce lieu-dit).

A la Révolution arrive à Bourbon, un personnage auquel l'histoire du Sud de l’île est étroitement liée, le Comte Denis-Marie Fidèle Amand Constant Le Coat de Kerveguen. Noble et ruiné, il s'installe à Saint-Pierre en 1796, dans une région à peine peuplée et se met à acheter toutes les terres de la région, si bien qu'au début du XIXème siècle toute la région du Tampon est une terre Kerveguen.

Si vous le voulez bien, nous allons continuer sur l’histoire du Tampon et nous allons revenir sur la dynastie Kervéguen tout à l’heure.

A partir de 1872, plusieurs essais de distillation eurent lieu au Tampon. Les frères Peverelly distillèrent le vétiver, et Bois Joli Potier se livra à des expériences sur le géranium. Il découvrit un procédé facile de distillation vers 1887. Le géranium convenait parfaitement à cette région dépourvue de moyens de communications. C'était un produit de faible volume, aisément transportable et qui se vendait très cher. Les habitants de la région se firent bûcherons et abattirent la forêt toute entière entre 1900 et 1920 pour la transformer en un immense champ de géranium.

Sur la ligne des 600, qui était aussi la route Hubert Delisle, s'installèrent de ravissantes petites maisons en bardeaux, faîtes avec les arbres abattus sur place, toutes entourées de jardins et de fleurs dont certaines subsistent de nos jours. Rapidement, la culture du géranium explosa car la concurrence mondiale était quasi inexistante et La Réunion pouvait imposer ses prix. L'année record fut 1925 : On produisit 174 tonnes d’huile essentielle qui se vendait jusqu'à 20 000 frs CFA le litre.

En 1910, débuta la construction de la première église du Tampon sous l'influence du Père Eugène Rognard. La messe inaugurale de l'église du Tampon eut lieu le 16 juin 1912, par le Père Rognard lui-même. Elle prit le nom de Saint-François de Sales.

La ville du Tampon prit tellement d’importance que le 29 juillet 1924 à la Chambre des Députés, Monsieur Daladier, ministre des Colonies, présenta un projet de loi tendant à détacher Le Tampon de la commune de Saint-Pierre. La loi fut promulguée au journal officiel le 21 mars 1925 et Égard Avril fut élu premier maire de la commune.

La nouvelle commune se trouvait alors étagée entre 400 et 1 800 m d’altitude.

Pendant de longues années, de nombreux petits propriétaires tamponnais vécurent du géranium. Puis, l'Afrique du Sud, l'Égypte et le Kenya se mirent à cultiver cette plante, ce qui provoqua une chute des prix et une forte diminution de la rentabilité du produit réunionnais.

Dans la seconde moitié du 20ème siècle, l'amélioration des conditions de vie résultant de la mise en place de la départementalisation, la réalisation de grands équipements et le volontarisme des équipes municipales transformèrent la commune en un pôle d'attraction et d'activités multiples telles que l'agriculture, l'artisanat, le tourisme.

En 1979, la commune du Tampon s'est agrandit en absorbant la région du Piton de la Fournaise à proximité de la Plaine des Cafres et, en 1989, la commune décida la construction de la Maison du Volcan.

Pa ailleurs et depuis plus de 30 ans, la commune du Tampon accueille une manifestation agricole et festive sous le nom de « Miel Vert », très appréciée des réunionnais.

S’agissant du Parc des Palmiers que nous avons visité ce matin, il est né à la suite d’une collaboration qui s’est développée entre l’Association Palmeraie-Union et la Commune du Tampon, en vue de réaliser un grand projet de Parc Botanique. Monsieur Pierre VALCK, Conservateur Honoraire des Jardins Botaniques de Nancy a été choisi pour présenter les études préliminaires du projet en 1998.

Le but était de créer à terme un vaste parc paysager de près de 20 hectares, présentant une collection unique de palmiers d’environ 40 000 sujets regroupant plus de 1 000 espèces différentes.

Il est à noter qu’il existe à travers le monde 2 800 espèces de palmiers réparties en 190 genres.

Inscrit dans une démarche environnementale, économique et sociale, le Parc des Palmiers de Dassy est un atout exceptionnel pour la Commune du Tampon. Référence mondiale pour les scientifiques et site touristique incontournable, le Parc des Palmiers a vocation à rayonner sur la région Sud et bien au-delà, à l’échelle régionale et même internationale car il espère devenir la plus importante collection de palmiers au monde.

Le Parc des Palmiers c’est l’invitation à une promenade avec une vue exceptionnelle sur le littoral sud, ainsi que sur les chaînes de montagnes du Grand Bénare au Piton des Neiges. En petite foulée ou en course d’endurance, le Parc des Palmiers est également un parcours de santé qui fait le bonheur de ceux qui apprécient le grand air. Son cadre enchanteur fait de la palmeraie un lieu privilégié pour photographier les cérémonies de mariages.

Passons maintenant à la dynastie Kerveguen. Quatre générations vont marquer La Réunion.

Première génération : Denis-Marie Fidèle Amand Constant Le Coat de Kerveguen (appelé Denis) est le premier de la ligné arrivé dans l’île en1796. La Révolution pousse ce fils de bourgeois ruiné, à fuir la Révolution française et à vouloir faire fortune dans les colonies. Bourbon est habité depuis à peine 50 ans où tout est encore à faire. Débarqué dans l’estuaire de La Rivière d’Abord, il s’installe à Saint-Pierre. Il ouvre un commerce de détail, avant de se lancer dans l’import-export et le commerce d’épices.

Quelques années plus tard, il se marie à une créole fortunée, Angèle-Césarine Rivière qui lui apporte en dot les propriétés de Manapany et Saint-Joseph. C’est le départ d’une nouvelle aventure, celle de la culture de la canne à sucre et des épices. De ce premier mariage naissent 5 enfants : Louis-Gabriel, qui sera appelé Gabriel (né le 10 mars 1800), Marie-Claude Adélaïde (née le 12 janvier 1802), Joseph Louis Antoine (né le 15 juin 1803, mort le 11 février 1811), Marie-Thérèse Françoise (née le 15 novembre 1804), Augustin Charles Armand (né le 10 juillet 1806). L’épouse de Denis décède en février 1815.

Ce dernier tente plusieurs expériences commerciales et financières : tissus, boulangerie, prêts avec intérêts, tout en développant ses activités agricoles.

Déjà fortuné, il se marie à nouveau à une riche héritière, Geneviève Hortense Lenormand qui lui apporte une dot encore plus conséquente que sa première épouse, dont le domaine des Casernes. Les terres à cannes et à épices se développent et le nombre d’esclaves sous sa coupe augmente considérablement. Il sera père de trois autres enfants : Denis-François (né le 17 avril 1817), Louise Thérèse (née le 30 novembre 1819), Ferdinand (né en 1821, mort à l’âge de 6 ans)

Deuxième génération : Gabriel le Coat de Kerveguen et Augustin le Coat de Kerveguen du premier lit et Denis-François le Coat de Kerveguen du second lit.

L’ainé des garçons, Gabriel se révèle bon commerçant  et doué pour les affaires. Il seconde efficacement son père dès 1820. Denis meurt en 1827, il laisse une fortune solidement établie : une centaine d’esclaves, 330 hectares de champs cultivés en cannes à sucre et en épices et une fortune de plus de 1,2 millions de livres. Belle réussite, car, à cette époque, seuls 3% de Parisiens ont un patrimoine de ce niveau. Ses restes seront ramenés à Paris par son fils Gabriel et déposés dans le caveau familial au Père-Lachaise.

Gabriel à 27 ans. Il gère les affaires de la famille d’une main de maître, fait construire une usine sur le domaine des Casernes où il édifiera le premier alambic et la première distillerie. Il commence à spéculer sur le café.

En 1829, avec son frère Augustin, Gabriel développe son entreprise d’import-export en achetant un premier navire « Le Renard ».  D’autres suivront. Concessionnaire d’une Marine, ils se lancent dans le commerce avec les pays de la zone Océan Indien, avec la Chine et la Métropole. Pour faciliter encore plus ses échanges, Gabriel pense à un projet de port pour Saint-Pierre et propose des plans au Gouverneur Darricau.

A 31 ans, Gabriel se marie avec Anne-Marie Chaulmet qui lui apporte le Domaine de la Ravine des Cabris. Il a un fils Denis-André (né le 6 janvier 1833) et une fille Marie-Angèle Emma (née le 3 novembre 1835), qui deviendra la Marquise de Trévise en épousant le grand Chambellan de Napoléon III.

Augustin épouse Thérèse Bergonié mais ne laisse pas de descendance, son unique fille étant morte en bas âge.

Les deux frères Augustin et Gabriel se lancent dans la politique, ils sont élus à Saint-Joseph et  Saint-Pierre.

Gabriel, fin stratège, investi dans le foncier à Saint-Louis, Saint-Pierre et Saint-Joseph. En 1834, il achète l’usine de Quartier-Français à Ste-Suzanne. A cette époque les banques et organismes de prêts, n’existent pas. Gabriel va emprunter de l’argent à un faible taux et le prêter à un taux plus élevé. Les biens de ses emprunteurs sont hypothéqués et les colons confrontés aux difficultés financières doivent lui céder leurs propriétés. 

L'impopularité de la famille Kerveguen, qui s'est développée au fil des temps, vient certainement de ces pratiques, qui deviennent souvent de véritables pièges pour les colons qui hypothèquent leurs biens. On dit de façon sans doute exagérée que les Kerveguen ont gagné plus d'argent avec les intérêts des prêts qu'avec le fruit de leurs récoltes.

Vers  1840, la fortune des Kerveguen est aussi puissante que celles des Desbassayns ou des Rontaunay. Les hauts de Saint-Louis, de Saint-Pierre, le Bras de Pontho, Montvert  tombent dans leurs escarcelles.

Dans chaque ville du sud de l’île, leurs magasins d’import-export, présentant un large choix de marchandises au détail deviennent incontournables. A l’approche de l’abolition de l’esclavage, les petits planteurs tentent de se défaire de leurs esclaves. Bien informé des indemnités qui seront versées par l’Etat, Gabriel les rachète et réalise de substantiels bénéfices.

En 1855, il possède en plus de l'usine de Quartier-Français, celles de Piton Saint-Joseph, de la Chapelle Cocos de Saint-Louis et des Casernes à Saint-Pierre.

Pour payer ses nombreux engagés sur ses propriétés et dans ses usines et distilleries, Gabriel de Kerveguen utilise des Kreutzers, pièces autrichiennes démonétisées qui s’appelleront Kerveguen.

Il domine de tout son poids tous les décideurs de l'île et il est difficile de contrarier ce monsieur dont la richesse lui confère des pouvoirs très étendus. Le gouverneur Darricau écrivait à ses supérieurs en France : « J'ai dû user de grands ménagements envers Monsieur De Kerveguen. Si j'eusse évincé sa proposition ainsi que je pouvais le faire, il était à craindre qu’il exigeât immédiatement de la banque un remboursement de ses actions et de ses dépôts, qui auraient absorbé toute son encaisse métallique et nous eût plongés dans une bien autre crise ».

L’aîné du deuxième lit, Denis-François a vécu de façon très effacée jusqu’à l'âge de 28 ans à Saint-Pierre, profitant des richesses familiales. Lassé des disputes avec son demi-frère, il décide de partir pour la France en 1845 et s'installe dans leur hôtel particulier de la rue Helder, à Paris, près de l’actuel opéra.

À Paris, Denis-François mène une vie oisive, fréquente les soirées mondaines. C’est ainsi qu'il rencontre Adèle Ferrand. Cette jeune fille est une artiste-peintre de grand talent : cinq ans auparavant, les beaux-arts de Paris lui ont commandé sur décision du ministre de la Culture l'exécution d'une copie du Christ de Proudhon, pour la décoration de la cathédrale de Toul. Ils se marient le 2 février 1846 à Paris et, le 1er décembre de la même année, naît Hervé Le Coat de Kerveguen. En 1847, la petite famille rentre à la Réunion, où Adèle n'aura que peu de temps pour connaître les différends familiaux et peindre quelques tableaux et portraits. Elle meurt subitement le 1er avril 1848.

Denis-François se lance en politique après la mort de son épouse. Il est élu au conseil municipal de Saint-Pierre en 1849 et devient maire de 1851 à 1853. Entre-temps, il s'est remarié à Augustine Motais de Narbonne le 15 janvier 1852. Il demeure conseiller municipal jusqu'à sa mort.

Malgré les différents qui opposent les deux demi-frères, dès que Denis-François est élu à la mairie de Saint-Pierre, Gabriel met à sa disposition des esclaves et des moyens financiers pour faire construire des routes, des canaux d’irrigation et d’alimentation en eau. Le Canal Saint-Étienne en est un exemple.

Gabriel donne des terrains et des sommes importantes aux autorités religieuses avant son départ pour Paris où il décède en 1860. Il laisse à son fils Denis-André et à son petit-fils Robert, un domaine qui couvre de vastes propriétés agricoles entre 150 et 1 000 mètres d’altitude sur Saint-Louis, Saint-Pierre, Saint-Joseph ainsi que 16 usines. Les héritiers investiront encore dans le foncier à Vincendo, Ravine des Cabris ou encore Bras Martin.

Troisième génération : Denis-André le Coat de Kerveguen, Augustin le Coat de Kerveguen (sans descendance) et Hervé le Coat de Kerveguen.

Denis-André qui a épousé Adèle de Mahy aura 3 enfants : Emmanuel, Gabrielle et Robert.

En 1879, les pièces étrangères sont interdites sur le territoire et Denis-André doit rembourser à l’Etat 814 000 Kreutzers qu’il avait continué à introduire dans l’ile alors que l’autorisation avait été donnée que pour 250 000 de ces pièces d‘argent.

Hervé épousera une demoiselle Doussart et il aura 4 enfant : Raoul, Zélie, Adèle et marguerite. Il laissera à sa mort, en 1922, en legs au musée Léon-Dierx, quelques beaux tableaux, œuvres de sa mère. Il est le seul Kerveguen à avoir sa tombe à la Réunion, au cimetière de Saint-Pierre. Son fils Raoul, à l'exemple de son père, raffermira les liens avec les descendants du premier lit, en travaillant en parfaite harmonie avec les enfants de son oncle Denis-André, ses cousins Emmanuel et Robert.

Plus tard, abandonnant la doctrine de la famille "Ténacité et Labeur", Robert, le fils de Denis-André, paie les dettes de la famille et liquide les propriétés les unes après les autres avant de gagner définitivement la France métropolitaine où la famille a une propriété.

D’après Nicolas de Launay de la Perrière, cette propriété en métropole serait le vaste terrain de Marne la Vallée sur lequel s’est installé Disneyland Paris.

Quatrième génération : Emmanuel le Coat de Kerveguen (marié à Gabrielle Trubert) donne naissance à Guy, Marie et Thérèse. Robert le Coat de Kerveguen (marié à Augustine de Villèle) donne naissance à Gabriel (mort-né en 1918), Geneviève, Anne, Jean (mort à 13 ans), Pierre, Yves et Hélène. Raoul le Coat de Kerveguen (marié à Isabelle Burette), n’a pas eu d’enfants.

Cinquième génération (Aucun membre de la cette génération n’a vécu à la Réunion) : Yves le Coat de Kerveguen (marié à Noëlle de Fry), Alexandra le Coat de Kerveguen, Robert le Coat de Kerveguen (resté célibataire) et Isabelle le Coat de Kerveguen.

Yves, était député maire de la ville de Vigny, située à une quarantaine de km de Paris, en direction de Rouen, où son père, en quittant la Réunion avait acheté un magnifique château médiéval de 115 pièces, 76 chambres, 58 salles de bain et un immense terrain disposant d’une belle église. Il est mort le 7 septembre 2007.

En 2016, il ne resterait que deux Kerveguen issus de la saga réunionnaise encore vivants en métropole : Robert (qui serait âgé de 53 ans) et Isabelle Kerveguen.

 

Source des informations sur la famille Kerveguen

I)          D’après Sabine Thirel qui s’est elle-même inspiré des ouvrages suivants :

« Histoire d’une dynastie insulaire, les Kerveguen » de Philippe Pluchons

« L’île de la Réunion - Etude de géographie humaine » de Jean Defos du Rau

« Une colonie île à sucre » et « L’homme et le sucre à La Réunion » de Sudel Fuma

 

II)           Dictionnaire généalogique des familles de l'Ile Bourbon - C. Ricquebourg

 

 

Caveau des kerveguen au pere lachaise

Caveau familial des Kerveguen au Cimetière du Père-Lachaise à Paris

 

 

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Sainte-Suzanne, la vanille et Albius
 

La vanille

 

La vanille

La vanille est le fruit d’une variété d’orchidée lianescente tropicale d'origine mésoaméricaine du genre Vanilla, principalement de l'espèce Vanilla planifolia.

La Mésoamérique, lieu d’origine de la vanille, est une aire géographique de l’Amérique Centrale précolombienne qui s'étend du nord du Mexique au Costa Rica, en incluant le Belize, le Guatemala, l'ouest du Honduras, le Salvador et le versant pacifique du Nicaragua.

La culture et la préparation de la vanille nécessitent, pour obtenir une épice richement aromatique, des soins longs et attentifs. Rapporté au poids, elle est l'un des produits agricoles les plus chers au monde. Étymologiquement, le nom vanille dérive de l'espagnol « vaina » qui signifie « gousse ». Cependant, botaniquement, il ne s'agit pas de gousses mais de capsules.

La Vanille est une orchidée grimpante de sous-bois qui se développe sur un tuteur. Elle possède des racines aériennes qui lui permettent de s’accrocher et de s'élancer à l'assaut de son support. Dans les exploitations agricoles, notamment en sous-bois les lianes sont rabattues pour permettre aux ouvriers de procéder à la fécondation des fleurs à hauteur d’homme. La multiplication de la vanille se fait par bouturage d’un morceau de liane.

Trois techniques de plantation sont principalement mises en œuvre :

  • En sous-bois, en utilisant les troncs des arbres comme supports ;
  • En culture intercalaire, par exemple entre les cannes à sucre ;
  • Sous ombrière.

Les feuilles ovales et charnues du vanillier sont disposées de manière alternée de chaque côté de la tige. Les fleurs groupées forment de petits bouquets à l'aisselle des feuilles. De couleur blanche, verdâtre ou jaune pâle, elles possèdent la structure classique d'une fleur d'orchidée.

Après la fécondation, l'ovaire qui faisait office de pédoncule à la base de la fleur se transforme en une capsule pendante longue de 12 à 25 centimètres. Les gousses fraîches et encore inodores ont un diamètre de 7 à 10 millimètres. Elles contiennent des milliers de graines minuscules qui seraient libérées par éclatement des fruits à maturité si l'on ne veillait à les récolter encore vertes.

L'histoire de la vanille est associée à celle du chocolat. Les Aztèques, et auparavant les Mayas, agrémentaient de vanille une boisson épaisse à base de cacao.

Ce sont les Totonaques, occupants des régions côtières du golfe du Mexique autour des actuelles villes de Veracruz et de Papantla, qui produisaient la vanille et en approvisionnaient l'empire aztèque. Selon la légende, la liane de vanille est née du sang de la princesse Tzacopontziza qui décida de fuir sa tribu pour rejoindre son aimé, le prince Zkatan-Oxga issu d’une autre tribu. Tous deux furent décapités par les prêtres de Tonoacayohua. Sur le lieu même de leur décapitation, le prince se réincarna en un vigoureux arbuste et la princesse devint la délicate liane d'orchidée enlaçant tendrement son amant.

Les Espagnols découvrent la vanille au début du XVIème à l'occasion de leur conquête du continent américain. Le commerce international ne prend de l'ampleur qu'à partir du XVIIème siècle. La vanille est introduite auprès de la reine Élisabeth 1ère d'Angleterre par son pharmacien, Hugh Morgan. Pendant plus de deux siècles, aux XVIIème et XVIIIème siècles, le Mexique, en particulier la région de Veracruz, conserve le monopole de la vanille. Les Totonaques demeurent les premiers producteurs mondiaux jusqu'au milieu du XIXème siècle.

Toutes les tentatives de faire produire cette orchidée hors de son aire naturelle d'origine se soldent par des échecs. On ignore en effet jusqu'au XIXème siècle que des pollinisateurs indigènes jouent un rôle fécondateur indispensable à la formation du fruit.

La vanille suscite un véritable engouement en Europe. Elle est notamment de plus en plus appréciée à la Cour de France qui décide de tenter l’introduction de la liane à l'île Bourbon (aujourd'hui La Réunion). Les diverses tentatives ne donnent aucun résultat.

La première pollinisation artificielle du vanillier est réalisée en 1836 au jardin botanique de Liège par le naturaliste belge Charles Morren, puis en 1837 par l'horticulteur français Joseph Henri François Neumann.

Ce n'est cependant qu'en 1841, à l'île Bourbon que le jeune esclave Edmond trouve le procédé pratique de pollinisation encore utilisé de nos jours. Cette méthode de pollinisation fait de l'île Bourbon le premier centre vanillier de la planète quelques décennies seulement après l'introduction de l'orchidée en 1819. À l'abolition de l'esclavage en 1848, on donne au jeune Edmond le patronyme d'Albius, en référence à la couleur « blanche » (alba) de la fleur de la vanille.

Ce sont les planteurs réunionnais qui introduisent vers 1880 à Madagascar la culture de la vanille. Les premières plantations sont faites sur l'île de Nosy Bé. De là, elles prennent ensuite pied dans les régions orientales de la grande île, celles d'Antalaha et de Sambava au climat humide favorable. L'engouement est rapide et la production malgache dépasse les 1 000 tonnes en 1929, soit plus de dix fois celle de La Réunion. Malgré la concurrence d'autres pays tropicaux comme l'Indonésie et l'émergence de nouvelles dynamiques de conquête du marché comme dans l'État du Kerala en Inde, Madagascar conserve toujours aujourd'hui son rang de premier exportateur mondial avec plus de 60% de la production mondiale.

Les professionnels s’accordent à considérer que la production mondiale annuelle de vanille préparée avoisine actuellement les 2 500 tonnes.

En 2015, Madagascar a produit 1 600 tonnes de vanille préparée et La Réunion en a produit 4 tonnes. Au cours de ces dernières années, le cours de la vanille a flambé : il a été multiplié par 10 entre 2012 et 2016. Selon le rapport Cyclope (qui est la bible des matières premières agricoles) le prix moyen de la vanille préparée malgache est passé de 50 dollars en 2012 (42,6 euros) à presque 500 dollars le kilo en 2016 (426 euros). Un rebond spectaculaire après l'effondrement que le marché avait connu en 2004.

La transformation de fruits parfaitement inodores en un produit agréablement parfumée nécessite une préparation minutieuse et méthodique dont les principes ont été développés au Mexique de longue date. La méthode la plus simple, dite préparation directe, consiste à laisser mûrir la gousse en alternant les expositions à l'ombre et au soleil, mais les résultats ne sont pas satisfaisants. On lui préfère la préparation indirecte commençant par un choc brutal qui « tue la gousse », suivi d'une série d'opérations de transformation, de séchage et de tri qui durent près de dix mois avant d'aboutir au produit fini.

Pour tuer la gousse, on peut pratiquer un passage au four, au froid, aux rayons infrarouges ou à l'alcool. Mais le moyen aujourd'hui le plus couramment employé est un bain d'eau chaude. C'est ainsi que débute le procédé élaboré en 1 851 par le Réunionnais Ernest Loupy à partir des connaissances mexicaines, et largement vulgarisé par David de Floris. Les étapes en sont les suivantes :

  • L’échaudage : des paniers emplis de gousses vertes de vanille sont plongés pendant trois minutes dans une eau portée à 65 °C ;
  • L’étuvage : les gousses sont aussitôt placées entre des couvertures de laine dans de grandes caisses pendant douze à quatorze heures ; ainsi maintenues au chaud, elles perdent leur eau, évoluent enzymatiquement et acquièrent leur belle couleur d'un noir chocolaté ;
  • Le séchage : pendant deux à six semaines, selon son niveau de qualité potentielle, la vanille est séchée quelques heures par jour d'abord au four (65 °C) sur des claies, puis au soleil, et enfin à l'ombre ;
  • La mise en malles : l'affinage se fait pendant huit mois dans des malles. C'est durant cette période que l'arôme se développe ;
  • Le calibrage : les gousses sont triées selon leur longueur, les plus longues sont les plus prestigieuses ;
  • Le conditionnement : traditionnellement, les gousses de même longueur sont bottelées, sinon elles sont ensachées.

Pour finir, précisons qu’en 1 876, Karl Reimer a réussi la mise au point de la vanilline de synthèse qui est devenue l'arôme le plus fabriqué dans le monde et dont la production actuelle est estimée à 12 000 tonnes par an (soit près de 5 fois plus que la production de vanille naturelle). Néanmoins, pour bon nombre de spécialistes, la vanille naturelle est seule capable de développer un parfum complexe formé de plusieurs centaines de composés aromatiques différents.

 

Edmond albius
 

Edmond Albius

 

Le vanillier a été introduit à la Réunion en 1819 par le jardinier botaniste Perrotet.

La fécondation naturelle des fleurs de vanille nécessitant l'intervention d'insectes spécialisés, présents uniquement dans les forêts  dont la vanille est originaire, les essais de plantation sont voués à l’échec.  

Edmond, un petit esclave va révolutionner la culture de la vanille. Il est né à Sainte-Suzanne en 1 829. Sa mère qui est esclave chez la sœur de Féréol Bellier Beaumont  meurt à sa naissance. Il est recueilli par ce dernier qui l’initie à l'horticulture et à la botanique. S'il n'est pas à l'origine de la première fécondation artificielle de la vanille (effectuée en 1 836 par Charles Morren, un naturaliste  belge), c'est lui qui, en 1 841 et alors qu'il n'a que douze ans, en découvre le procédé pratique de pollinisation de la vanille, un procédé qui permet à La Réunion de devenir pour un temps le premier producteur mondial et le berceau de la diffusion d'un nouveau savoir-faire.

En effet, sept ans après la découverte d'Edmond, l'île exporte ses premières vanilles, une petite dizaine de kilos. Elles passent à 267 kilos en 1 853 et à plus de 3 tonnes en 1 858. À la fin du XIXème siècle, elles rapportent autant que le sucre. En 1 892, près de 4 200 hectares sont plantées en vanille. Les expéditions atteignent 200 tonnes en 1 898 et la vanille de l'île rafle les grands prix des expositions universelles de 1 867 et de 1 900.

Parce qu'elle est celle d'un enfant, noir et esclave de surcroît, la paternité de la découverte est toutefois rapidement contestée. À l'origine du développement de l'actuel Jardin de l'État de Saint-Denis, le botaniste Jean-Michel-Claude Richard prétend ainsi avoir enseigné la technique de fécondation à l'esclave trois ou quatre ans plus tôt. Le jeune Edmond est alors vigoureusement défendu par Ferréol Bellier Beaumont ainsi que par le naturaliste Eugène Volcy Focard et un certain Mézières de Lepervenche.

Dans une lettre datée du 17 février 1 861, Férol Bellier relate les circonstances dans lesquelles Edmond à découvert le procédé de la fécondation artificielle de la vanille. Je le cite :

« Je me faisais aider par lui pour la fécondation des fleurs d'une plante de la famille des citrouilles, appelée jolifiat. Dans cette plante, les fleurs mâles et les fleurs femelles sont séparées et sur des rameaux différents. J'enseignais au petit noir, Edmond, à cueillir les premières et à les poser avec soin sur les fleurs femelles, qui sous elles, portent l'embryon du fruit, comme dans les citrouilles. Je ne me souvenais plus de cette enseignement lorsque, la même année, me promenant avec mon fidèle compagnon, j'aperçus sur le seul vanillier que j'eusse alors une gousse bien nouée. Je m'en étonnai, et la lui fit remarquer. Il me dit que c'était lui qui avait fécondé la fleur. Je refusai de le croire. Mais deux ou trois jours après je vis une seconde gousse près de la première. Lui de me répéter son assertion. Je demandai alors comment il avait fait. Il exécuta devant moi cette opération que tout le monde pratique aujourd'hui. L'intelligent enfant avait su discerner, dans la même fleur, les organes mâles et femelles et les mettre convenablement en rapport … J'essayai d'expliquer le procédé au public. Des amis me dirent que je n'étais nullement parvenu à me faire comprendre et bientôt Messieurs Sarrasin Floris, Patu de Rosemont, Vinet et Madame Joseph Desbassyns, en envoyant chercher Edmond et le faisant opérer devant eux purent faire connaître partout le procédé de la fécondation ... »

Malgré ce soutien, la controverse persista, même après la mort des différents protagonistes. Au début du XXème siècle, un titre de presse va jusqu'à affirmer à tort qu'Edmond était blanc.

En réalité, devenu homme libre avec l'abolition de l'esclavage en 1 848, il reçut son nom de liberté : Albius qui signifie Blanc.

Affranchi, Edmond Albius va vivre à Saint-Denis où il trouve un emploi d'aide cuisinier chez un officier de la garnison. Il est alors impliqué dans une affaire de vol. Le 15 juin 1 852, il va être condamné à cinq ans de travaux forcés.

Le 26 avril 1 855, le Gouverneur Hubert De Lisle décide de le faire libérer pour bonne conduite après trois ans d'emprisonnement.

Edmond Albius décède à l'hospice de Sainte-Suzanne le 9 août 1 880, dans le dénuement le plus complet.

 

 

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Salazie et Anchaing

 

Piton d anchaing

 

Les légendes de Salazie

 

Le Cirque de Salazie ne laisse pas sa part en matière d'histoires fantastiques. Voici les plus connues :

•Anchaing et Héva

Anchaing (premier habitant de Salazie) était un esclave marron, qui avec sa femme et ses enfants, a tenté de vivre en dehors de la société esclavagiste.

On raconte qu'Anchaing, esclave d'un riche propriétaire de la côte Est de l'île, aurait fuit l'esclavage et se serait caché sur le piton qui porte aujourd'hui son nom, après que son propriétaire ai violemment battu sa femme, Héva. Du piton où ils étaient installés, Anchaing pouvait voir de loin les chasseurs d'esclaves, dont le célèbre Bronchard.

La fin de cette légende diffère selon les versions. Certains racontent, qu'un matin, Anchaing s'est retrouvé nez à nez avec Bronchard alors qu'il pêchait. Celui-ci aurait alors fait feu sur Anchaing, qui sauta dans un ravin. Pensant qu'Anchaing était mort, Bronchard reparti. Mais, légèrement blessé, Anchaing regagna son campement et vécu avec sa femme près d'un quart de siècle sur ce piton.

D'autres racontent que Bronchard aurait réussi à capturer les fugitifs et qu'il les aurait ramené à leur propriétaire. Ce dernier venait de décéder et sa fille décida de rendre leur liberté à Anchaing et Héva.

Enfin, une dernière version veut qu'Anchaing ait été repéré par la fumée d'un feu qu'il aurait fait. Alors capturé par des chasseurs de marrons, il aurait été abattu par Bronchard.

•Le voile de la mariée

La cascade Le voile de la mariée doit son nom à l'histoire d'un jeune homme riche qui tomba amoureux d'une jeune fille modeste. Le père de cette dernière s'opposait fermement à leur relation. Malgré cela, les deux jeunes gens décidèrent de se marier. Le père de la jeune fille, apprenant leur union, se rendit à l'église muni d'un sabre lors de la cérémonie pour tuer son gendre. Les jeunes mariés s'enfuirent et la jeune femme glissa puis tomba de la montagne. Son voile se serait accroché le long de la paroi et aurait donné ce nom à la cascade située à Salazie village.

Certains racontent qu'il est déjà arrivé que le débit de l'eau soit tellement important que les vapeurs qui s'y dégageaient, donnaient un effet ressemblant véritablement à un voile.

 

 

Anchaing et heva

 

Anchaing et Heva

 

Que sait-on vraiment d’Anchaing et de sa femme Héva ? Pas de généalogie, pas d’histoire officielle. Pourtant, avec le Piton d’Anchaing qui s’élève au milieu du Cirque de Salazie, l’île porte, dans sa chair même, la trace de ces marrons qui au nom de la liberté ont défié l’ordre colonial esclavagiste. Leur histoire, qui croise le réel, le possible et l’imaginaire, a fécondé le mythe et la légende qui se sont  développés dans la tradition orale et  les textes littéraires.

Anchaing est une des figures de marrons les plus travaillées par la littérature réunionnaise. Le poète Lacaussade, le premier, propose une version sublime de cet homme qui se rebelle contre sa condition d’esclave. Il en fait un insoumis, pacifique et fier, solitaire et travailleur. Dans sa forteresse minérale, Anchaing sauve sa liberté et affirme son humanité.

Cette représentation est inséparable de la sensibilité romantique du poète abolitionniste. Elle initie une présentation héroïque du marron qu’on retrouvera dans les textes ultérieurs qui attacheront désormais le destin d’Anchaing à celui de sa compagne Héva.

Anchaing et Héva deviennent marrons pour fuir  l’esclavage. Toutes les versions soulignent la vie simple et paisible de ce couple de marrons lié par l’amour, la fidélité et l’attachement à leurs enfants. Leur histoire nous renvoie le plus souvent à l’époque des grands chasseurs d’esclaves du XVIIIème. Elle présente cependant des variantes notables selon les textes écrits. Certains le nommeront Anchain, d’autres Anchaing, ou Anchaine ou encore Ansin.

  

Eugène Dayot fait d’ Héva une marronne rencontrée de manière providentielle, alors que la plupart des autres textes lient le destin d’Anchaing et Heva dès l’habitation du maître. Ils fuient la cruauté de celui-ci envers Heva. Ils remontent alors la rivière du Mât et s’installent sur leur piton où ils vivent de cueillette, de cultures, de chasse et de pêche.

Ils se préservent de la société coloniale esclavagiste en guettant, du haut de leur repaire, les  détachements de chasseurs. La plupart des auteurs font d’Anchaing un homme pacifique, détaché des luttes de pouvoir qui affectent les chefs marrons. Cependant, Dayot et Léal soulignent la solidarité qui le lie à certains d’entre eux  avec lesquels il communique et entretient des alliances familiales : ses filles Marianne et Simangavole étant les femmes des chefs Cimandef et Matouté. Cette dimension plus épique est travaillée dans l’œuvre poétique de Boris Gamaleya.

Anchaing et Héva sont recherchés par les détachements de chasseurs blancs à l’affût du moindre feu ou signe portant trace de vie des fugitifs.

Dayot fait d’un certain Touchard, compagnon de Mussard, l’exécuteur d’Anchaing. D’autres auteurs désignent Caron ou Bronchard.

Quant à la mort elle-même du ou des personnages, elle est souvent différente.

Hery et Vinson ramènent Anchaing et Héva à l’habitation du maître qui serait décédé entretemps, où ils sont accueillis avec clémence par la fille de ce dernier. Cette fin peut se lire dans le prolongement de la pensée coloniale paternaliste.

Dans la version écrite que Daniel Honoré donne de la légende populaire, Anchaing échappe une première fois au fusil de Bronchard en se précipitant dans le vide. Puis, capturé avec sa famille, il est libéré par Margot, la fille du maître qui leur accorde la possibilité de retrouver libres leur piton bien aimé.

La légende d’Anchaing et Héva varie donc bien selon les récits. Certains ne manquent pas de fantaisie. Ainsi Vinson imagine une rencontre incroyable entre Anchaing et le savant Commerson qui fraternisent … Une des versions orales le montre narguant les chasseurs de manière irrévérencieuse ; une autre le transforme en papangue au moment où il se lance dans le vide pour échapper aux balles….

La représentation d’Anchaing en patriarche, dont la vie est accordée à la nature, est éloignée de celles de marrons guerriers. Sa compagne Héva voit sa stature légendaire s’affirmer dans les œuvres plus contemporaines. Ainsi devient-elle, à l’égal d’Anchaing, une belle figure de femme libre. Tous deux nous disent le refus de l’oppression et expriment l’aspiration à la liberté et à la dignité.

Il appartient désormais à l’histoire et à l’archéologie de faire parler les signes qui pourraient indiquer la présence de marrons sur le Piton d’Anchaing.  La silhouette imposante du massif qui culmine à 1356 mètres, au cœur du cirque de Salazie, en fait toujours une forteresse pour le randonneur d’aujourd’hui, même si sa progression est facilitée par un sentier bien tracé sous un couvert ombragé. On arrive alors à un plateau en surplomb du cirque, et on peut dire comme Vinson « Jamais plus magnifique autel fut élevé au culte de la liberté. »

 

D’après Marie-Claude David Fontaine

 

 

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Le Volcan de La ?Fournaise et les époux Krafft

 

Volcan 1

 

Maurice et katia krafft

Katia et Maurice Krafft – surnommés : « Les Diables des Volcans »

 

À l'entrée de la Cité du volcan, ce sont Katia et Maurice Krafft qui accueillent les visiteurs. Sur fond d'éruption du piton de la Fournaise, Katia à gauche, Maurice à droite, nous invitent à partager leur passion avec cette petite phrase d'introduction : "J'aime les volcans parce qu'ils nous dépassent. Ils sont indifférents à la vanité des choses humaines."

Katia Conrad est née le 17 avril 1942 à Soulz (dans le Haut-Rhin). Elle passe avec succès le concours de l’École Normale en 1957. Puis, titulaire d’une maîtrise de géochimie, elle reçoit le Prix de la Vocation en 1969 pour ses premiers travaux de volcanologie.

Maurice Krafft est né le 25 mars 1946 à Mulhouse. Il assiste à 7 ans à sa première éruption au Stromboli. Membre de la Société Géologique de France à 15 ans, il obtient une maîtrise de géologie à l’Université de Strasbourg en 1970.

Maurice et Katia se rencontrent à l’Université en 1966 et se marient en 1970. Dans l’intervalle, en 1968, ils fondent le Centre de Volcanologie Vulcain à Cernay (en Alsace). Ils publient leur premier livre en 1971. Dès lors, au fil de leur vie consacrée aux volcans, ils écumeront ensemble plus de cent cinquante éruptions sur tous les continents. Ils sont de toutes les expéditions : Italie, Islande, Indonésie, Afrique, Amérique, la Réunion, Hawaï, Nouvelle-Zélande... Leurs reportages leur valent l'attribution du Prix de la Société de Géographie de Paris, puis la remise du Prix Liotard de l’Exploration, remis le 25 février 1975 à l’Élysée par le Président de la République Valéry Giscard d’Estaing.

Ils s'orientent délibérément vers l'étude de la phénoménologie éruptive, et font largement partager leurs découvertes à la communauté scientifique. Mais c’est surtout au travers de la diffusion des connaissances et de l’information du public que les époux Krafft concrétisent leur enthousiasme. Ils publieront une vingtaine d’ouvrages, réaliseront six longs-métrages et participeront à de nombreuses émissions télévisées et à des conférences.

Au cours de leurs pérégrinations sur les volcans de la planète, le couple découvre notre île dès 1973 pour "Connaissance du monde" le cycle de conférences qu'ils animent. S'ensuivent plusieurs séries d'expéditions, notamment en 1975, 1976 et 1977, où le piton de la Fournaise se déchaîne.

Katia et Maurice Krafft plaident pour la mise en place d'un observatoire du Piton de la Fournaise qui ouvrira ses portes en 1979. Ils proposent la construction d'un musée, envisagé à Saint-Philippe au départ. Finalement La Cité du volcan verra le jour en 1992, à la Plaine-des-Cafres.

Ils s’investissent aussi en Auvergne avec un projet initial, dénommé Volcania, qui constituera les prémices du Parc Européen Vulcania, lancé par Valéry Giscard d'Estaing au cœur des volcans d'Auvergne, dans le Puy-de-Dôme.

Dans une interview en 1981, Maurice Krafft nous confiait ces mots : « Katia et moi, nous vivons au rythme des colères de la planète et en douze ans de carrière, nous sommes déjà centenaires, tant sont nombreuses les belles et fabuleuses éruptions volcaniques qui se bousculent dans nos mémoires. Katia, moi et les volcans c'est une histoire d'amour. Notre passion est exclusive, dévorante, loin des hommes. Si nous avons encore le courage de vivre dans notre société moderne, c'est grâce aux volcans, aux joies qu'ils nous apportent par leur beauté, leur sérénité, leurs embrasements, leur violence qui peut-être un jour aura raison de notre témérité. » Il ne croyait pas si bien dire !

Leurs vingt-cinq ans de carrière se résument en 175 éruptions volcaniques, observées sur tous les continents, qui ont donné lieu à la publication d'une vingtaine de livres, dont deux consacrés au piton de la Fournaise en collaboration avec le photographe réunionnais Roland Bénard. Katia et Maurice Krafft ont constitué un patrimoine iconographique tout à fait exceptionnel de plus de 300 000 photos et 300 heures de film.

Je ne peux pas passer sous silence le différend qui a opposé Haroun Tazieff aux époux Krafft au sujet de leurs compétentes de volcanologues. Pour ma part, je suis d’avis de trancher en faveur des époux Krafft. En effet, d’après le journaliste et écrivain Guy Benhamou, Tazieff  possédait un bagage acquis dans les universités belges, mais dans la pratique, ses connaissances en physique et chimie se révélaient très lacunaires. Au point de commettre des bourdes dignes d'un cancre de terminale, en affirmant par exemple que l'hydrogène sulfuré (H2S) est plus léger que l'air. Ses missions n'étaient jamais des missions scientifiques, mais conçues d'abord comme des expéditions destinées à faire de bons films. L'essentiel du travail scientifique qui porte son nom a en fait été l'œuvre de ses équipiers, ingénieurs et chercheurs, qu'il savait choisir pour leurs compétences.

La devinette favorite des volcanologues était, à une époque : «Comment composer la meilleure équipe de volcanologie du monde ? En prenant tous ceux que Tazieff a virés.» Dogmatique, Haroun Tazieff, qui s’est trompé à plusieurs reprises, ne supportait ni la contradiction ni la concurrence. Maurice Kraft devait en grande partie à Tazieff sa passion des volcans. Les deux hommes se sont longuement fréquentés, Tazieff soutenant les débuts de ce jeune explorateur enthousiaste. Jusqu'au jour où, fin 1970, Tazieff croise son disciple sur un plateau de télévision et constate avec rage que Kraft parle aussi bien et fait d'aussi belles images que lui. Dès lors, Maurice Krafft est devenu l'homme à abattre, se souvient un proche.

Lorsqu'on lui demanda un jour ce qu'il pensait de Tazieff, Jean Goguel, l'un des pères de la géologie française, décédé en 1986, fit mine de réfléchir et lâcha : «Tazieff ? Ah oui, le photographe"» Un résumé cruel mais saisissant de ce que Tazieff laisse en héritage à la volcanologie.

Mais revenons aux époux Krafft et en ce jour de 1991 où la violence du Mont Unzen eut raison de leur témérité. Toujours prêts à sauter dans le premier avion, Katia et Maurice Krafft avaient rejoint le 29 mai 1991 la ville de Shimabara au Japon, espérant une fois de plus immortaliser dans leurs boîtes magiques les soubresauts ardents du Mont Unzen. Mais cette fois-ci, le volcan était gris. Et le piège se referma brutalement sur eux. Le 3 juin 1991, une coulée pyroclastique leur a été fatale, ainsi qu’à quarante-cinq autres personnes. Une coulée pyroclastique se caractérise par un mélange, à très haute température, de gaz volcaniques, de vapeur d'eau et de particules solides  qui s'écoule à grande vitesse au voisinage du sol, souvent fortement soumis à la gravité et guidé par la topographie des lieux.

Les corps de Katia et Maurice Krafft ont été déposés dans le Temple Anyoji de Shimabara, élevé à la mémoire des victimes de l’éruption du Mont Unzen de 1792 qui fit 15 000 morts.

Après leur disparition, la collection Krafft, unique au monde, fut répartie entre le Muséum d’Histoire Naturelle de Paris et l’association "Images et Volcans", créée pour gérer un impressionnant fonds d’images.

À Vulcania, une exposition permanente, dans un espace dédié leur est spécialement consacré.

Aujourd'hui, à la Réunion, un piton dans l'enclos de la Fournaise, des rues et une école rappellent leur souvenir.

 

 

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Saint-Pierre et la Saga Isautier

 

Ancienne distillerie isautier

 

Alfred isautier 1881 1955

Alfred Isautier (1881-1955)

 

La dynastie Isautier

 

La dynastie Isautier à la Réunion, démarre avec l’arrivée de deux frères issus de la bourgeoisie parisienne, Louis et Charles Isautier.

En 1832, Louis Isautier embarque pour l’Ile Bourbon et s’établit dans le sud de l’île. Son frère Charles le rejoint deux ans plus tard. C’est la pleine effervescence sucrière. Ils s’allient à une grande famille de propriétaires terriens du Sud, les Orré. Louis épouse Appolonie Orré en 1835 et Charles épouse sa cousine germaine, Antoinette Orré, en 1840.

Associés en affaires, les frères et leurs épouses fondent en 1845 l’entreprise familiale dont les activités se concentrent alors sur la production de sucre et de rhum.

En 1861, Louis meurt sans laisser de descendance. À la mort de Charles, en 1865,  c’est sa veuve Antoinette qui, aidée par ses trois fils, reprend les rênes de la Maison Isautier.

C’est une femme d’affaires redoutablement efficace : sous l’étiquette « Veuve Isautier et Fils » elle porte les rhums produits par la famille à un niveau de reconnaissance mondiale. Les médailles obtenues lors de différents concours internationaux à Paris, Amsterdam, Moscou, Anvers … témoignent de sa volonté d’exporter le savoir-faire réunionnais.

Sous sa houlette, le rhum Isautier, conditionné en bouteille de grès, devient une valeur de référence, un ambassadeur de charme pour l’île de La Réunion.

Plus tard, elle lance la diversification de l’entreprise dans la minoterie et la boulangerie.

Au cours de la deuxième génération, celle de Charles Isautier fils, Antoine Isautier et François Isautier, les trois fils de Charles et d’Antoinette, ces derniers ne souhaitent pas tous reprendre la gestion des affaires familiales. La rupture arrive avec François Isautier. Diplômé de la faculté de médecine de Paris en 1877, il s’investit dans la politique de santé publique. Après un premier échec en 1881, il est élu maire de Saint-Pierre (de 1888 à 1900) et siège également un temps au Conseil général et à la Commission coloniale. Il est également président de la Chambre d’agriculture de Saint-Pierre.

L’exercice du pouvoir politique va aussi séduire la troisième génération constituée de Paul et d’Alfred Isautier. Paul (1879-1942), fils de François Isautier, fait des études de médecine à Paris puis se lance dans la politique dans le groupe radical-socialiste. Il est adjoint au maire de Saint-Pierre entre 1912 et 1918. Il est élu maire en 1919, mais il doit renoncer à ses fonctions pour raison de santé. C’est Victor Le Vigoureux qui devient le maire de Saint-Pierre, avec Paul comme premier adjoint. Cette carrière politique amène Paul à s’opposer au clan des Kerveguen. Il est accompagné dans sa démarche par son jeune frère Alfred (1881-1950). Les Isautier défendent la population opposée aux grands propriétaires et industriels. Paul insiste sur la mise en place de mesures sociales et s’oppose résolument aux conservateurs. Les Isautier font partie de ces «nouveaux venus» dans l’élite réunionnaise qui s’opposent aux plus anciens, grands propriétaires depuis des décennies.

À partir de 1910, Alfred s’impose comme l’homme qui va moderniser la distillerie familiale. Il élargit la gamme, notamment avec les recettes de punchs, introduit un nouveau modèle de bouteille triangulaire et des techniques de production innovantes.

Il est mobilisé pendant la Première Guerre mondiale. C’est son épouse Nelly, qui gère l’entreprise pendant son absence.

Après la guerre, Alfred délaisse la politique et investit dans l’usine des Casernes à Saint-Pierre. Avec Paul, il rachète la distillerie appartenant jusqu’alors à la société «Isautier Frères et compagnie». Paul poursuit sa carrière de médecin et revend ses parts à Alfred qui devient alors le seul dirigeant de la distillerie.

La quatrième génération est constituée des trois fils d’Alfred Isautier : Paul-Alfred (dit « Ti Fred »), Charles et Henri. À partir de 1935, ils font entrer la Distillerie dans l’ère du Rhum de sucrerie, élaboré à partir de la mélasse. Au cours des Trente glorieuses, les Etablissements Isautier se développent.  Dans les années 1960, ils se diversifient massivement, mais rapidement le premier choc pétrolier arrive avec son cortège de difficultés pour les entreprises. Puis la conteneurisation des marchandises importées et le développement de la grande distribution va entraîner une cascade de fermetures d’entreprises qui seront incapables de concurrencer les produits venus d’ailleurs. Au début des années 1990, le groupe se recentre alors sur trois domaines : l'agriculture, le patrimoine bâti existant et évidemment le rhum.

De la dynastie Isautier, Paul-Alfred est sans conteste le plus illustre. Il est né le 29 juin 1911 à Saint-Pierre. Il fréquente l’école d’Anse-les-Hauts,  le collège de Saint-Pierre et le lycée Leconte de Lisle à Saint-Denis.

Pour la suite de ses études, il se rend en métropole. Il effectue une formation d’ingénieur à l’École nationale supérieure des industries agroalimentaires de Douai et il obtient son diplôme d’ingénieur à l’âge de 21 ans.

Officier d'artillerie à l'issue de son service militaire, il regagne la Réunion et succède à son père de 1936 à 1956 en tant que directeur des Établissements Isautier.

Il se marie en 1936 avec Solange Sanglier de la Bastie, qui lui donnera 6 enfants : Jacqueline, Jean-Pierre Yves, Jean-Claude, Christian, Gérard et André.

Mobilisé, pendant la Seconde Guerre mondiale il part pendant cinq ans en Métropole comme officier d'artillerie de réserve puis il retrouve La Réunion en 1945 avec le grade de capitaine.

De retour au pays, Paul-Alfred reprend la direction des Etablissements Isautier. Comme nous venons de l’évoquer, c’est lui qui fait entrer l'entreprise familiale dans l'ère moderne du rhum de sucrerie fabriqué à partir de la mélasse et qui amorce la diversification des activités en leur adjoignant une soixantaine de petites entreprises annexes : bâtiment et travaux publics, huilerie, minoterie, menuiserie, etc.

De 1951 à 1956, il est président du Syndicat général des travaux publics et du bâtiment de la Réunion. Il est également à la même période administrateur de plusieurs sociétés telles que la Banque de la Réunion et les Sucreries de Bourbon, et d'institutions telle la Caisse générale de Sécurité sociale...

Malgré toutes ses fonctions publiques, il trouve encore le temps de participer à des recherches agronomiques, afin d’améliorer les rendements des produits agricoles. Il obtient les décorations d’officier de l’Ordre national du mérite et chevalier de la Légion d’honneur.

Il entre en politique au début des années 1950. En octobre 1951, il est élu conseiller général, comme représentant du 2e canton de Saint-Pierre. En mars 1959, il entre au conseil municipal de Saint-Pierre comme adjoint au maire de Pierre-Raymond Hoarau.

26 avril 1959, Paul-Alfred Isautier est élu sénateur de La Réunion, il occupe cette fonction jusqu'en 1974. Au Sénat, il rejoint le groupe des Républicains Indépendants et il est nommé à la commission des affaires culturelles. Il exerce aussi la fonction de conseiller général de 1964 à 1970 puis de 1976 à 1984. Il choisit alors de se consacrer presque exclusivement à ses fonctions politiques et cède la direction des Etablissements Isautier à son frère Charles. Le 26 septembre 1965, il est réélu sénateur de La Réunion.

1er octobre 1967, il est élu au second tour des municipales, maire de la Ville de Saint-Pierre. Il crée alors à Saint-Pierre la première zone industrielle de l’île et plus d’un millier d’emplois. Puis une seconde zone industrielle qui porte l’industrialisation de la ville à une soixantaine d’hectares. Il construit la première station d’épuration du Sud. Il ouvre des mairies annexes à Grand-Bois, Mont-Vert-les-Bas, Terre-Sainte, Ligne-des-Bambous, Ravine-Blanche. Il crée une police municipale, de nombreux équipements sportifs, rénove l’hôtel de ville, installe le 2e RPIMA à Pierrefonds et le RSMA à Terre-Rouge.

Paul-Alfred Isautier ne se représente pas aux sénatoriales de 1974. Il se replie sur la scène politique réunionnaise et plus précisément sur la mairie de Saint-Pierre qu'il administre jusqu'en mars 1983. Cette année-là, Elie Hoarau lui succède au siège de maire de Saint-Pierre.

Jusqu’à sa mort, il est conseiller général. Miné par la maladie, Paul-Alfred Isautier s’éteint dans la nuit du 4 septembre 1984 à l’hôpital intercommunal de Saint-Pierre - Le Tampon. Il repose dans le caveau familial, au cimetière de sa ville natale.

Le groupe hospitalier Sud-Réunion porte désormais son nom.

Frère de Paul-Alfred, Charles Isautier succède à ce dernier à la tête des Établissements Isautier, lorsque celui-ci se fait élire sénateur de La Réunion. Charles dirige l'entreprise pendant de nombreuses années. Il a été par ailleurs le président de la Chambre de commerce et d'industrie de La Réunion de 1975 à 1983.

Finalement, de cette quatrième génération, Paul-Alfred sera l'homme politique. Henri s'occupera de l'agriculture alors que Charles sera l'industriel.

Avec la cinquième génération, Jean-Pierre Isautier, le fils de « Ti' Fred », devient président du conseil d'administration du groupe et en  2000, Jérôme, issu de la sixième génération, prend le poste de directeur général.

Un musée est édifié au Chemin Frédeline : La Saga du rhum voit le jour en 2008 à Saint-Pierre.